101022 : Takamatsu
22 octobre. Jour 11.
Ce matin, était une autre journée que j'attendais avec impatience, car nous allions rendre visite à un maître de thé de la tradition Mushanokoji Senke. A Kyôto, le berceau de la culture du thé, il est impossible pour un gaijin comme moi de pénétrer les sphères des écoles de thé. Même pour les japonais eux mêmes, ce n'est pas chose facile. Il faut être situé très haut dasn la "hiérarchie du thé" pour pouvoir avoir accès aux jardins de Ura Senke, Omote Senke ou encore Mushanokoji Senke. Il existe plusieurs centaines de Sukiya (maison pour le thé) privés dans tout Shikoku et en particulier dans la préfecture de Kagawa. Mais ici, nous ne sommes pas dans une ancienne capitale, il n' y a pas de "m'as tu vu", les choses sont alors beaucoup plus simples. C'est donc ainsi, qu'à 10 heures pétantes, je me retrouvais devant la maison de Chujo sensei. David et sa femme Yasuio arrivèrent quelques minutes après.
Nous avons été accueillis par le sensei lui même. Nous avons eu la chance extraordinaire de visiter les différentes pièces à thé (chashitsu) de la maison. En effet, plusieurs types de cérémonies peuvent être conduites en ces lieux, et chacune est adaptée à une utilisation précise. J'ai demandé à visiter les mizuya (pièce de préparation) également, et la chose m'a été accordée sans aucun problème. C'était même plutôt l'inverse : Chuji sensei était étonné que je connaisse ce terme ! ^____^
Puis nous avons attendu devant le jardin (roji)... la claque ! une nouvelle fois, des dimensions plus que restreintes, et une harmonie parfaite entre tous les éléments : arbres, plantes, pierres, bâtiments... tout est imbriqué avec grâce sans heurts pour le regard... je sens l'émotion m'envahir, et me contiens pour ne pas verser une larme...
L'entrée de la maison de thé de Chujo sensei.
Le devant de la porte à été arrosé... comme il se doit.
La pièce d'attente intérieur (koshikake)
Un des nombreux chashitsu (pièce à thé) de la maison.
Le sotoroji, le jardin extérieur.
Uchiroji (jardin intérieur) avec le sôan (cabane à thé rustique).
Le koshikake machiai (banc d'attente couvert).
Le chiorido (porte médiane légère en bambou).
L'entrée de la salle ryurei.
Mais avant, halte obligatoire au tsukubai.
Les zôriroji, pour aller au jardin.
Chuji sensei nous invite ensuite à le rejoindre dans la pièce dédiée au ryurei, c'est un chanoyu qui se déroule à table. Cela permet aux personnes âgées et aux occidentaux de pouvoir pratiquer ou assister à un chanoyu, sans avoir à supporter les affres de la position seiza. Il est intéressant pour moi de noter les petites différences, propres à Mushanokoji Senke) qui viennent se glisser dans le temae (le processus de préparation). Mais au final, ce ne sont que des détails insignifiants. Quel que soit l'enseignement que l'on suit, la finalité reste la même : faire de son mieux pour que tout soit parfait pour ses invités. Bref, une dame d'une grande prestance vient bientôt nous rejoindre : c'est elle qui va nous préparer le thé sous l'oeil attentif du sensei. Nous avons droit chacun à un bol de usucha (thé léger), le mien était un superbe kuroraku (un bol raku noir), David a eu droit à un akaraku (un raku rouge), Yasuio un bol, qui à la base ne devait pas en être un, mais détourné de sa fonction première par le sensei qui l'a rapporté de Paris ! Quant à Nobuko-san, notre accompagnatrice Shikoku Muchujin, elle a bu dans un bol richement décoré rapporté une fois encore du Vénézuela !!! Ce sensei est fantastique, il a un discours auquel j'adhère totalement : le thé ce n'est pas de posséder de superbes dogu (ensembles d'ustensiles). Nul besoin de posséder un kuroraku hors de prix fait par un des descendants du célèbre Chujiro, un bol que l'on aime fait pareil office. Du coup, à la fin de la cérémonie, je cours chercher dans mon sac mon nécessaire à thé, et me permets d'offrir à Chujo Sensei, un des bols fabriqués à ma demande par mon amie Ulla Fröhle.
Touché, Chuio, me fait l'honneur de me préparer lui même un nouveau bol de thé, en utilisant celui que je viens de lui offrir ! Je suis super heureux de voir que ce simple cadeau lui fasse plaisir. Ulla, je sais que tu lis ces lignes, et bien sache qu'il y a un de tes bols chez un grand maître de thé japonais !!! ^___^
Mushanokoji senke ryurei temae.
Une céramique rapportée de Paris par Chujo Sensei et utilisée comme chawan (bol à thé).
Chujo sensei préparant un usucha (thé leger) avec le bol offert réalisé par Ulla Fröhle.
Du coup, l'ambiance étant excellente, nous sommes invités à visiter le soân (pavillon de thé rustique)...... SSSSUUUUUUUUUUUUGGGGGGGGOOOOOOOOOOOIIIIIIIIIIIIIIIII !!!!!
L'endroit est exceptionnellement beau... cela me donne envie de tout casser chez moi, et de tout refaire !!! Depuis que je me suis lancé dans la construction de Chisôan, j'ai appris beaucoup plus de choses, et si je devais le refaire aujourd'hui, je le ferais différemment... Le prochain sôan que je ferais, sera mieux j'espère !
^____^
Du coup, on a droit à un koicha (thé épais) en rabe, mais cette fois en seiza !!! Puis nous avons beaucoup échangé sur le thé, par l'intermédiaire de Yasuio (Aligato gozaimashita). Ce fut encore une fois, un moment exceptionnel que je dois à Ozaki-san. Merci, merci et encore merci. Je suis reparti avec la carte de Chujo sensei, et il m'a dit que le jour où il viendrait sur Bordeaux, il aimerait beaucoup voir Chisôan ! Il m'a même invité à revenir le voir dès que possible pour que je puisse lui préparer un bol de thé !!! Mais pourquoi le Japon est-il aussi loin de la France ???? é__è
J'espère de tout coeur, que cela pourra se faire un jour. En attendant, Chujo sensei devrait être à la Japan Expo de Paris l'année prochaine, si son emploi du temps le lui permet. Rendez-vous a donc été pris pour nous retrouver à cette occasion. Merci infiniment pour l'accueil formidable que vous nous avez réservé Chujo sensei, je vous suis infiniment reconnaissant. m(_ _)m
Dans le sôan.
A la place du Teishu (l'hôte).
Le koicha (thé épais) n'est pas "battu", mais "malaxé" tant sa consistance est pâteuse.
Gros plan sur le dogu (l'ensemble des ustensiles).
Le sôan, avec les shoji retirés, laisant la lumière entrer à l'intérieur.
Aligato gozaimashita Chujo sensei. Matane !
m(_ _)m
L'après midi étant libre, je décide de retourner au Ritsurin, où j'ai passé 2 heures paisibles à contempler, l'étang, ses koï, les arbres, les gens... en mangeant une glace au macha (comme si je n'en avais pas eu assez le matin !!!!).
Comment vais-je faire pour garder intact tous les souvenirs intenses de ces formidables journées ? Je me le demande.
à suivre ou pas...
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